Trois fois rien
27 février 2022
Avertissement : ce billet de blog a été rédigé dans un contexte de seum absolu. Pas sûr qu’il vous colle la banane. En ce qui me concerne, rassurez-vous. Rien qu’en le relisant, ça va déjà beaucoup mieux.
Décembre, janvier et février sont des mois que je n’apprécie guère. Les jours sont trop courts, mon moral au plus bas, le soleil aux abonnés absents ou planqué derrière les immeubles, il fait trop froid et je ne quitte pas mon bonnet et ma capuche. J’avoue que cette année, les mauvais esprits de l’hiver se sont particulièrement déchaînés contre ma modeste condition de mortel à roulettes.
Vous vous souvenez ? Dans ma dernière publication, j’étais sur le point de me rendre à l’hôpital Neurologique de Lyon, Unité 400, pour un changement anticipé de pompe à Baclofène. Je fais un dernier rappel de ce qu’est cet appareil étrange pour ceux qui n’auraient pas suivi mes mésaventures récurrentes depuis ces quatre dernières années. Ce dispositif électronique autoporté est donc une pompe de 12 cm de diamètre et de 2,5 d’épaisseur environ, implantée gracieusement genre Alien sous la peau de mon ventre et reliée à ma moelle épinière par un cathéter. Tous les deux mois, on me la remplit de produit avec une grosse seringue et celui-ci, diffusé dans la moelle épinière à débit régulier, est censé limiter, voire faire disparaître tout état spastique. Les spasmes, c’est quand les jambes bougent dans tous les sens sans qu’on ne leur ait rien demandé. C’est assez gênant au quotidien.
Le 7 décembre dernier, je suis donc hospitalisé une première fois pour un changement de l’appareil en question. L’opération se déroule pour le mieux. Anesthésie générale imposée, malgré ma demande d’anesthésie locale ; réveil toujours désagréable ; quelques jours d’observation et une sortie au bout de quatre jours. Rapide et efficace, si ce n’est une cicatrice bien moche. On dirait que j’ai été recousu sur le champ de bataille avec une agrafeuse. Je rentre donc chez moi, change de pansement tous les jours et mon infirmière retire mes agrafes au bout de 12 jours, selon le protocole établi. La cicatrice est toujours aussi vilaine, boursouflée par endroit, mais paraît relativement saine. Pas d’inquiétude à ce sujet. Je reprends le travail, sans souci et surtout sans spasmes. Quel confort !
Le 23 décembre, je ne sais pas comment j’ai eu la bonne idée de me faire injecter ma troisième dose de Pfizer. Autant les deux premières avaient été sans effet, cette troisième dose me valut une nuit particulièrement compliquée entre le 24 et le 25 décembre. Ça tombait mal. Je vomis mon foie gras et je me retrouvai au lit à 21h30. Quelle soirée ! Je retrouvai miraculeusement l’appétit le lendemain chez mes parents, entre les escargots de Bourgogne et le veau aux girolles. Je ne me suis même pas abstenu de reprendre un peu de foie gras. Nouveau repas de Noël le surlendemain chez mon frère et son épouse. Cette fois-ci, ce n’est ce n’est pas la digestion des mets riches qui m’inquiète, mais la tronche de ma cicatrice qui s’est recouverte d’une gigantesque fistule remplie d’eau. Forcément, ça coupe un peu l’appétit. L’après-midi, à force de frottement, celle-ci se perce et inonde mon pull et mon pantalon. Nous désinfectons et constituons un pansement avec les moyens du bord. L’infirmière locale, les matins suivants, restera légèrement dubitative devant la chose, surtout que mon état général ne laisse rien présager. Changement d’ambiance en rentrant à Lyon quelques jours plus tard. Je me sens beaucoup moins bien, Les spasmes ont repris puissance cinq, comme pour m’avertir d’un truc louche qui se fomente à l’intérieur. L’infirmière lyonnaise, plus stressée, me conseille de me rendre chez mon généraliste le jour même. Nous sommes le 31. Vous voyez arriver le truc ?
Mon nouveau médecin traitant, trentenaire hyper connecté reprenant le cabinet de mon généraliste retraité réfractaire à l’écran, craint une infection et me met sous antibiotiques. Je bats le record du réveillon de Noël en me couchant à 21h, en ayant absorbé une banane. Durant le week-end, l’infirmière entreprend de nettoyer la cicatrice, limite atroce, qui laissera des traces. Au passage, elle trouve un morceau de fil noir, visiblement oublié lors de la précédente intervention. Elle transmet des photos et un compte rendu précis au chirurgien de Neuro. Celui-ci en prend visiblement connaissance le 3 janvier au matin, puisque un appel téléphonique de l’hôpital me cueille au bureau en milieu de matinée et me convoque pour une hospitalisation d’urgence à 14 h. Un abandon de poste plus tard, je retrouve ma chambre de décembre orientée sud, des têtes connues, le plaisir d’une toilette à la Bétadine rouge et celui de revêtir une superbe chemise d’hôpital à petits motifs non boutonnée dans le dos. Je fus mis immédiatement à la diète au cas où une place se libère au bloc le jour même. Ça ne fut pas le cas. J’eus donc droit à un dîner frugal avant d’être de nouveau à la diète. Ça serait forcément pour le lendemain matin. Ce fut pour le lendemain après-midi. 1h45 d’intervention dont je ne ratais pas une miette puisque cette fois, j’avais négocié une anesthésie locale. Je l’ai presque regretté. C’était long, visiblement gore (une interne s’est sentie mal…), très inconfortable, il a fallu m’attacher les jambes car si je ne ressens pas la douleur, mon corps lui, réagit plutôt violemment à toute agression et pour finir, mon chirurgien a vraiment des goûts musicaux de m…. Bref, il a réouvert, nettoyé, coupé les bords qui étaient infectés, changé un cathéter non approprié, déplacé la pompe et refermé le tout soigneusement avec des fils.
Je me retrouvai de suite dans ma suite, sans passer par la salle réveil, bien fatigué et très affamé. Heureusement, à l’hôpital, on dîne très tôt. Le soir même, j’ai revu le film de Alejandro González Iñárritu, « The revenant », avec Di Caprio. C’est drôle, c’est la deuxième fois que je vois ce film à l’hôpital. C’est peut-être parce que je me sens parfois revenant moi-même.
Sous le gros pansement compressif, je n’ai d’abord rien remarqué. C’est quelques jours plus tard que je réalise que ma pompe a effectivement été déplacée mais positionnée à la verticale. Ce n’était pas franchement esthétique avant. Désormais, couché sur le dos, on dirait que j’ai un kyste de la taille d’un brugnon espagnol. Merci qui ? Bref, je reste quelques jours en observation et sous antibiotiques et je sors avant le week-end. Les spasmes ont disparu et je me sens suffisamment bien pour reprendre le chemin du bureau dès le lundi, nonobstant une tension très basse, sans doute due à un débit trop important de baclofène. Une semaine plus tard, je suis de retour à l’hôpital, car cette fois, ils ont tenu à enlever eux même les points. Profitant de l’occasion, je leur demande de réduire le débit de ma pompe pour faire enfin remonter cette tension de bulot.
Les trois semaines suivantes se caractérisent par un presque retour à la normale. La tension remonte, les spasmes réapparaissent légèrement, j’ai froid en permanence mais globalement ça passe.
Il a fallu attendre le premier week-end de février pour que les choses dérapent de nouveau. Spasmes omniprésents, tension très haute et surtout fièvre de cheval. Premier réflexe, un bon autotest Covid qui s’avère négatif. Le lundi matin, la fièvre me cloue au lit. Je m’en extrais péniblement l’après-midi pour rendre visite à mon généraliste. Nouveau test Covid, de nouveau négatif. Il suspecte une infection. Il téléphone à mon chirurgien. Le lendemain, je suis de nouveau hospitalisé.
Je suis au bout du rouleau. Le chirurgien aussi. Il envisage tout d’abord de retirer la pompe, sans solution « anti spasmes » de rechange. « Vous êtes sûr ? » lui demandé-je. Non, il n’est pas sûr. Et nous optons pour un scanner préalable à toute intervention. Celui-ci s’avère plutôt rassurant. Mais il nous fallut attendre (…) l’avis du grand professeur chef de service pour éviter définitivement l’opération sans retour. Je resterai 8 jours au total coincé dans cette chambre surchauffée. La fièvre tombera sans qu’on en connaisse l’origine. On me détectera triomphalement une modeste infection urinaire. J’ai eu beau leur dire qu’il n’y avait là rien d’exceptionnel, que l’infection était quasi permanente du fait des auto sondages, ils avaient l’air tellement contents d’eux. Le temps de déterminer quel traitement antibiotique sera le plus adapté et je m’extirpai enfin de cette fange aseptisée.
Après ces trois séjours hospitaliers, je m’efforce de reprendre une vie normale. Ça n’est pas chose facile. Dix jours après ma sortie, les spasmes sont de nouveau présents, surtout le soir et mon escarre refleurit avec l’arrivée précoce du printemps. Je ne vais plus faire de sport. Je n’en n’ai ni l’envie ni le temps. Je n’ai plus envie de grand chose d’ailleurs.
Mon associé a raison. Je suis dans le « bad » et ça fait un moment que ça dure. Je tente de garder ma motivation intacte, ma bonne humeur et mon humour, de ne pas trop penser à Zemmour, à Poutine ni même à tous ces gens qui s’avèrent parfois bien décevants.
Dans une semaine, c’est mon anniversaire. Je devrais sûrement retrouver le sourire.
Mental en béton pour supporter tout ça….
Bonne journée anniversaire entouré de toute ta famille en Or .. en te souhaitant des jours meilleurs..
Go!C’est ton anniv Michel j’espère que tu passes une belle journée. Tu as un gros mental .Respect biz Daniel
Happy you mon Mimi.
La Polynésie ne serait pas un fis o pour le PMR que je te proposerais bien de venir y chauffer tes miches ppur passer l’hiver.
Miss you
Kiss you
Très dur ton billet …. à lire! donc à vivre je ne peux même pas l’imaginer .
je t’embrasse Michel et comme Philikou je te souhaite des jours meilleurs.
A très bientôt